30 octobre 2023

Sécurité urbaine et contrat social : les voix de Lagos

Samson Faboye

Dans cette exploration complète de Lagos, l'auteur se penche sur la dynamique de la sûreté et de la sécurité dans ces zones, en soulignant la prédominance des communautés fermées et le rôle des gardes de sécurité privés et des justiciers.

Bâtiment à Johannesburg

Photo : Paul Saad

Lagos, capitale économique du Nigéria, compte environ plus de 20 millions d'habitants. Le terme « Lagos » est couramment utilisé pour désigner deux connotations différentes. Premièrement, malgré son importance économique, l'État de Lagos est le plus petit des 36 États du Nigéria. Inversement, il existe aussi un « Lagos » situé au sein de cet État. L'île de Lagos, également appelée Eko en yoruba, la langue indigène la plus répandue dans la métropole, lui a donné son éponyme. Curieusement, lorsque l'on évoque la prétendue ville de Lagos, on fait souvent référence à l'État de Lagos.

J'ai vécu les dix-sept premières années de ma vie à Lagos [État de Lagos]. Bien que cela fasse maintenant plus de dix ans que je n'y ai plus résidé de manière permanente, l'expérience lagosienne reste gravée à jamais dans ma mémoire, et peu de choses ont changé depuis. Néanmoins, j'ai sollicité l'avis de quelques résidents actuels pour enrichir la mise à jour de cet article. Les résidents interrogés ont présenté leurs expériences de résidence à Lagos, toutes stratifications socio-économiques confondues.

Sur le plan socio-économique, l'État de Lagos est divisé en deux zones : l'île et le continent. Abritant le centre financier et commercial du Nigéria, l'île est un terme générique désignant les quartiers aisés, tandis que le continent désigne les quartiers défavorisés (en réalité, situés sur le continent de Lagos). Indépendamment de ces délimitations, les deux zones partagent des rues fermées et des quartiers résidentiels surveillés par des agents de sécurité privés ou des milices. Si les quartiers huppés comme Lekki, Ikoyi et Victoria Island peuvent être considérés comme sûrs, un répondant a fait valoir que les bidonvilles de Lagos bénéficient d'un niveau de sécurité unique, car leurs habitants se connaissent bien. Ainsi, même si les bidonvilles peuvent abriter des chômeurs et des personnes économiquement démunies, plus enclins à commettre des délits, ils ne sont pas infestés de criminalité comme on le pense.

La culture des rues fermées, répandue dans la métropole de Lagos, restreint la circulation des habitants. Ces restrictions sont de deux types :

Restrictions temporelles : Dans de tels cas, une heure est fixée pour fermer la rue/porte communautaire, après laquelle l'accès est interdit aux non-résidents.

Restrictions d'accès pour les non-résidents : Les collectivités adoptant cette mesure, généralement situées dans des zones socio-économiquement aisées, n'autoriseraient l'accès qu'à leurs résidents. L'accès pour les non-résidents nécessite l'autorisation expresse d'un résident.

Les vols à main armée, les vols de véhicules, le vandalisme et le vol de téléphones sont des crimes préoccupants dans la métropole de Lagos. La présence policière se concentre sur les patrouilles routières, avec une présence clairsemée au sein des communautés. Le Corps de sécurité de quartier de Lagos (LNSC) constitue un autre élément de sécurité de l'État au sein de l'architecture sécuritaire de la métropole de Lagos. Alors que le gouvernement fédéral contrôle la police depuis Abuja, le LNSC est contrôlé par le gouvernement de l'État de Lagos. Cependant, seuls les policiers sont autorisés à porter des armes.

Les résidents interrogés confirment leur méfiance à l'égard du dispositif de sécurité gouvernemental, d'où un fort recours aux initiatives privées et communautaires pour assurer la sécurité. Néanmoins, une collaboration existe entre les réseaux de sécurité communautaires et gouvernementaux. Cette collaboration s'appuie sur la synergie des Associations de développement communautaire (ADC) et des Conseils de développement communautaire (CDC), ces derniers étant regroupés au sein d'une même zone. Ces organisations communautaires sensibilisent les résidents aux préoccupations sécuritaires des agences gouvernementales.

L'influence des technologies numériques sur la lutte contre la criminalité est ambiguë. Un habitant a déclaré : « À ma connaissance, je n'ai constaté aucune application des technologies numériques [pour lutter contre la criminalité] ». Si cela peut être vrai dans une certaine mesure pour les mesures numériques matérielles, les réseaux sociaux [mesures numériques douces] se sont avérés pertinents. Les habitants utilisent les comptes Twitter des agences de sécurité gouvernementales, du personnel et des fonctionnaires pour signaler les activités criminelles. Les applications de messagerie instantanée comme WhatsApp et Telegram sont également utiles pour les mises à jour de sécurité entre les habitants des zones de contrôle. Bien que des systèmes de vidéosurveillance soient installés par l'État sur les principaux axes routiers, il semblerait qu'ils ne soient pas destinés à la lutte contre la criminalité ; ils servent plutôt à contrôler le respect des permis de conduire.

La satisfaction des habitants quant au respect par le gouvernement de son engagement social en matière de sécurité est insatisfaisante. Malgré l'inefficacité des mesures de sécurité formelles, les habitants de Lagos ont trouvé des espaces propices à la formalisation de mesures de sécurité informelles afin de sécuriser leurs communes. Il existe un besoin pressant de mesures de sécurité numérique concrètes, comme l'installation de vidéosurveillance dans les rues et de kits numériques (notamment des caméras corporelles) pour les agents de sécurité, car cela devrait considérablement renforcer le cadre de sécurité existant dans la métropole de Lagos.